Qu’est devenu « El Rey » John Galliano ?

Florin-Yéboué Joëlle
24 Aout 2014


Ici, nous parlons du « Rey de la moda », et ça n’est pas un abus de langage que de nommer ce génie créatif de la haute couture ainsi. En effet, il possède un nom des plus nobles (Juan Carlos Antonio Galliano Guillén), qui, toutefois, ne lui aura pas suffi et permis d’assurer sa carrière en toute sérénité, et sans bavures. Pourtant, ses débuts furent très prometteurs, et il a su se démarquer comme peu dans la profession l’ont fait. Retour sur un parcours presque royal.


Crédit Paolo Rovers
Diplômé de la prestigieuse école Central Saint Martins – College of Art and Design de Londres, en 1984, il y fondera la même année sa marque éponyme. A ses débuts, le succès et le soutien ne sont pas au rendez-vous. Toutefois, la réussite, même timide au départ, finit par se montrer. Il obtient à trois reprises le prix du « Styliste britannique de l’année ». Puis, il décide de partir tenter sa chance à Paris, capitale de la mode. Cette décision va changer sa vie. Il commence à se faire connaitre dans le milieu et auprès de grandes célébrités, telles que Madonna ou Diana Ross. 

Ainsi, Bernard Arnault, PDG du groupe de luxe LVMH le remarque, et c’est en 1995, qu’il est nommé directeur artistique de Givenchy, puis des collections féminines de Dior l’année suivante. Il œuvrera pour l’image de la marque, la remettant au goût du jour et lui apportant un peu de son originalité, extravagance et excentricité ; puis pour celle de ses parfums, dès 2001. Ce styliste iconoclaste et provocateur mènera Dior au sommet.

« L’auto régicide »

C’est en 2011 qu’il commença. Le 24 février au soir, il a été aperçu puis interpellé à la terrasse du café La Perle dans le 3ème arrondissement de Paris, pour violences et insultes à caractère raciste et antisémite à l’encontre d’un couple, et, ironie du sort, il s’agissait d’un des quartiers historiques de la communauté juive de la ville. Le couple victime, lors de son témoignage, rendit plus claires ces accusations en citant les violents propos du couturier britannique : « Dirty jewish face, you should be dead » (Sale tête de juive, tu devrais être morte), et « Fucking Asian bastard, I will kill you » (Putain de bâtard asiatique, je vais te tuer). Il sera libéré « sur instruction du parquet ». Par ailleurs, cette agressivité a pu être expliquée par la période sombre qu’il traversait au moment des faits. Le principal intéressé a révélé sa triple addiction, à l’alcool, aux somnifères et au valium, et fut arrêté avec un taux anormalement élevé de 1.1 mg d’alcool par litre de sang.

Le 25 février 2011, il est suspendu de ses fonctions de directeur artistique de la maison Dior, en attendant la fin de l’enquête. Le jour suivant, une deuxième plainte pour insultes à caractère raciste ayant eu lieu en octobre 2010, est émise à son égard. En conséquence, un mois plus tard, John Galliano est licencié de chez Dior et en avril 2011, il le sera de sa propre marque et société John Galliano SA, cette dernière étant détenue majoritairement et à plus de 90% par Dior. Le verdict du Tribunal Correctionnel de Paris le condamnera à 6000 euros d’amende avec sursis, 16 500 euros de frais de justice et 1 euro symbolique aux victimes et associations qui se sont constituées partie civile. Par la suite, le talentueux styliste, sans travail, sans Légion d’honneur et en perdition de sa réputation, tombera peu à peu dans l’oubli.

Le retour du Roi

Celui qui a redoré le blason de la très célèbre marque Dior, devenu quasi invisible du monde de la mode depuis 2011 et son licenciement, a repris du service et fait parler de lui. En effet, il a collaboré avec Oscar De la Renta lors de la Fashion Week à New York, en février 2013, apportant un peu de sa fantaisie et touche personnelle au défilé du couturier dominicain.

Puis, plus récemment, nous l’avons retrouvé en Russie, en étroite collaboration avec l’Etoile, dont il est le directeur artistique depuis mai 2014. C’est à un « Géant » auquel s’est attaqué notre cher Roi, puisque l’Etoile, filiale du groupe Alcor & Co, est la plus grande chaine de cosmétiques russe, comptant plus de 800 magasins à travers le pays et totalisant un chiffre d’affaires en constante hausse, qui s’élevait à plus d’1 milliard de dollars en 2013.

Celui qui a été banni et rejeté du monde occidental de la mode, remplacé par le très discret couturier belge Raf Simons ; après avoir brillé de pleins feux sur les podiums et en dehors, s’est orienté du côté oriental et légèrement moins pailleté du milieu de la beauté. En dépit des évènements et malgré les conséquences, il a su dès ses débuts nous éblouir par son talent et nous faire rêver par sa créativité. Bien qu’ayant été détrôné, John Galliano restera à jamais un « enfant terrible de la mode », un styliste majestueux, notre Roi pour l’éternité.